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 You ran away and you took my heart

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You ran away and you took my heart Vide
MessageSujet: You ran away and you took my heart   You ran away and you took my heart EmptyMer 23 Déc - 15:51

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    Cela faisait deux semaines que j’avais posé les pieds à Black Valley. Ma première impression sur cet endroit restait très mitigée. Dès les premiers jours, les gens m’avaient paru soit pris d’une grande terreur dont j’ignorais l’origine, soit fou. Il fallait être aveugle pour ne pas être décontenancé par l’ambiance étrange qu’il régnait ici. C’en était presque surnaturel. Et la deuxième semaine n’avait guère était plus joyeuse. Un troisième groupe de personnes s’était même ajouté aux deux autres. Je les appelais les « mystérieux », pour plusieurs raisons. Leur façon de me fixer du regard, de me narguer avec leur sourire narquois puis de s’en aller, comme s’ils étaient appelés ailleurs tout à coup me donnait l’envie d’aller leur demander ce qui les dérangeait tant, chez moi. Autour d’eux flottait une aura de silence et de secret. Non, vraiment, cette ville ne m’inspirait pas confiance. Déjà, je me demandais si tout ceci était raisonnable. N’avais-je pas agi sur un coup de tête en prenant le premier avion pour les Etats-Unis ? N’était-ce pas de la folie de partir ainsi à la recherche d’un homme dont vous ne savez presque rien de sa vie ? C’était ahurissait de voir ce dont une femme était prête à faire par amour. Les hommes aussi, peut-être… C’était à voir. Et pourtant, quelque chose m’empêchait de quitter cette ville pour retourner bien sagement au Canada. Bien que les gens soient pour la plupart muets comme des tombes, j’avais réussi à découvrir que Jon s’était bien installé ici, il y avait peu de temps. J’ignorais encore la raison qui l’avait conduis dans cette ville, mais cela ne saurait tarder. Dieu seul savait à quel point il était difficile de m’enlever une idée de ma petite tête… Pas si petite que ça, en fin de compte. A présent, je tentais d’obtenir son domicile, son job, quelque chose qui aurait pu m’amener à le rencontrer. Les gens restaient néanmoins sur leur garde, et même en usant de mon charme je ne parvins pas à obtenir ces informations. Personne ne le savait. Personne ne l’avait vu. Personne ne parlait. Et peu à peu, je comprenais d’où venait la catégorie des fou. Ce mutisme général faisait perdre la raison. Heureusement, j’avais appris à jouer ce jeu, et j’étais d’ailleurs plutôt bonne joueuse. En plus de vouloir retrouver mon bien aimé, mon ambition était de dénouer le secret qui planait à Black Valley. Ou plutôt les secrets.

    Pour mettre toutes les chances de mon côté et le retrouver, je fréquentais les zones peu recommandables, où peu de personne osait s’aventurer seul. Je connaissais assez bien Jon pour ne pas ignorer sa petite préférence au silence et à la solitude. J’avais également conscience de son besoin de proximité avec les autres lorsque cela le prenait. Malgré tout le mystère qui l’encerclait, il restait un homme sociable. Ainsi, tous les soirs j’allais prendre un café dans ce bar, le White Horse, le plus populaire de Black Valley, j’avais pu comprendre. C’était également le meilleur endroit pour récolter des informations. Les gens, après avoir bu une petite bière ou un bon verre de vin sont toujours plus communicatifs. Ensuite, il suffisait de se mettre au comptoir et d’attendre les jeunes garçons vous proposer un verre. Un sourire en coin, un bref échange d’éloquence et de formules de politesse et enfin, les questions sur ce fameux endroit et sur Jonathan Peter Bass. Les réponses tournaient autour de « Bass ? Je… je ne vois pas de qui vous voulez parler. » et « Ma pauvre enfant… oubliez ce Bass et venez faire un tour chez moi, qu’en dites-vous ? ». Comme si je n’avais que ça à faire. Comme si je pouvais oublier ce Bass !

    Aujourd’hui encore, à 20 heures 30 précisément j’entrai dans le White Horse et m’installai au comptoir. Un bref signe de la main au serveur et celui-ci m’apporta mon expresso coutumier. Je commençai à être une habituée, malgré moi. Je sortis une cigarette pour la première fois depuis mon arrivée, ce qui témoignait de l’impasse dans laquelle je me trouvais en cet instant. Il ne pouvait tout de même pas être invisible. Il ne pouvait pas s’être envolé, non plus ! Après une semaine à avoir fait le tour de la forêt, de la ville, des ruelles abandonnées ou encore du cimetière, mes jambes me faisaient souffrir. Mon impatiente me faisait bouillonné de l’intérieur. Mon envie de le revoir me faisait perdre la raison. J’appelai le serveur et lui commandai un verre de Porto, la solution à tous mes maux… Ou presque. Il me lança un regard interrogatif, car tout comme la cigarette, c’était bien la première fois que je commandais de l’alcool fort ici. Mais que voulez-vous, j’avais beau avoir un caractère fort et une grande carapace, je restais très instable et lunatique. Ma sensibilité enfuie et souvent invisible pouvait resurgir à tout moment, en ces instants de doutes. Les questions et les recherches furent donc reportées à demain. Je ne baissais pas les bras, je baissais les armes pendant quelques heures. Mon verre de Porto à la main, ma cigarette de l’autre, je balayai la seule d’un bref regard. Encore plus que l’alcool, les bras d’un homme m’étaient d’un réconfort sans pareil. J’en trouverais bien un dans cette foule, parmi les fou et les peureux, qui voudrait passer les nuits à mes côtés pour repartir comme si de rien n’était le lendemain à la première heure. Cela ne m’était plus arrivé depuis longtemps. Plus d’un an… Depuis ma rencontre avec Jon, à vrai dire. Mais puisqu’il m’avait oublié, je l’oublierai à mon tour.

    Et c’est lorsque je lançai un regard circulaire à l’assemblée que je croisai son regard. Il était assis à l’autre bout du comptoir et me regardais avec insistance mêlé à une certaine prudence. Ce regard que je lui connaissais si bien, ténébreux et charmeur, mystérieux et indéchiffrable. Je n’aurais su me tromper. Combien de fois ne m’étais-je pas perdue dans ce regard si profond… Et encore maintenant, j’aurais pu m’y laisser noyer si je n’avais pas pris garde de détourner le regard. Une immense vague de tristesse et de souvenir m’envahit tout à coup. Mon verre s’échappa de ma main et se brisa sur le sol, laissant le liquide se déverser à mes pieds. Le bruit du verre brisé ne me parvint même pas. Le grabuge qui suivit, certains applaudissements grotesques et les grondements du barman me parurent lointain, comme dans un rêve éveillé. Ou plutôt un cauchemar… Et tandis que tout le monde s’affairait autour de moi, j’osais reporter mon regard à l’autre bout du comptoir, où Jon n’avait pas bougé et me regardais encore intensément. J’entrouvris légèrement la bouche comme pour lui murmurer quelque chose à l’oreille et prononçai lentement :

      ●● Pourquoi es-tu parti.. ?


    Plusieurs mètres nous séparaient, et il était impossible qu’il ait pu entendre ces quelques mots. Et pourtant, quelque chose en moi me laissait croire que l’impossible ne faisait pas parti de ce monde de fou…


(c) .. & Psykie
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MessageSujet: Re: You ran away and you took my heart   You ran away and you took my heart EmptyJeu 24 Déc - 2:49

    « Infâme soit l’isolement incessant ».

    Un mois. Aujourd’hui, cela faisait un mois que je subsistais à Black Valley. Un mois long. Dès le lever du jour, je savais déjà ce que j’allais faire à son coucher. Moi qui détestais tant la monotonie … J’étais servi. Les habitants étaient froids et méfiants, et n’apportaient aucune compassion aux nouveaux arrivants. Comme s’ils craignaient quelque chose, ils se terraient jour et nuit et ne sortaient qu’à de rares occasions. Je trouvais un certain réconfort dans la forêt, j’en avais presque élis mon domicile. J’y passais des journées entières, au calme et repos. Parfois, alors que je rêvassais et que mes pensées divaguaient sur des mers agitées bien loin de mon être, j’attendais une réponse des arbres. Chaque jour, j’espérais qu’ils sortiraient enfin de leur léthargie et qu’ils me parlent, m’occupent. Avant, j’aurais tout fait pour un moment de silence total mais maintenant j’en avais fait mon ennemi. Il me pesait et à chaque bruit qui venait le briser, je sursautais. De plus, les ombres devenaient oppressantes, guettant, épiant. Chaque nouveau pas me semblait être une erreur fatale, celui qui amènerait trop loin. Comme la plupart de mes promenades s’étiraient considérablement sur la nuit, la noirceur était malsaine. A chaque fois, L’obscurité régnait en unique maitre absolu. Parfois, je me demandais si je ne me promenais pas dans les ténèbres en personne, dans un endroit où personne ne s’échappe. Malgré cela, à chaque fois, je rentrais sagement chez moi mais ses illusions devenaient obsessionnelles. J’en étais certain, j’avais découvert en cette forêt un endroit bien sombre, où tout le monde s’incline devant la puissance irréfutable du Silence.

    Je me promenais le long de l’Hadley Road et je laissais mes songes l’emporter. La lune émanait une fine luminosité qui venait trancher cette obscurité oppressante. Quelques hiboux venaient perturber le calme absolu avec leurs hululements persistants. Je revenais d’une promenade en forêt qui s’était avérée être tourmentée. J’étais toujours silencieux, pas encore remis de ces trop fortes émotions.

    Alors que j’avançais de vitesse constante, je n’espérais plus qu’une chose, mon lit. Néanmoins, j’avais besoin de bruit, de gens, de mouvements. Ma vie devenait trop ressemblante à celle d’un ermite et cela me dérangeait. Je décidai donc de faire un détour par le White Horse, à l’autre côté de la ville. La neige fondait rapidement et laissait le long des routes des flaques d’eau immaculée. Alors que les hiboux faisaient mines de se taire, le calme revenait. Ce silence était exagérément pesant pour être supporté. Il me faisait quitter la raison pour regagner les rangs de la folie. Il commandait les âmes en péril qui déliraient dans les eaux troubles des vastes étendues stagnant entre les côtes de la lumière et de l’obscur. Le silence jugeait. Et son jugement était irrévocable. Il condamnait aussi. Il rendait fou. Chaque nouveau gémissement qui déchirait le paisible me faisait tressaillir.
    Avant d’entrer dans le bar, je lançai un furtif regard vers la lune. J’attendais ce jour depuis la dernière pleine lune, mais aujourd’hui je n’aurais aucune proie. Tant pis. Je poussai la porte et entrai. Il n’y avait pas énormément de monde, seulement quelques habitués. J’allai directement m’asseoir au bar et pris comme d’habitude, une boisson non-alcoolisée. C’était en fait assez dangereux un loup-garou mais alors s’il avait en plus bu de trop quand il était encore sous sa forme humaine, les dégâts étaient considérables. Je ne voulais pas prendre ce risque. Je restai silencieux, mes oreilles faisant le reste. Je laissais volontairement mes pensées s’évader, à la quête d’horizons meilleurs. Même si je ne me l’avouais pas explicitement, Vancouver me manquait. Ses rues et ses toits, ses parcs et sa mer, ses autochtones et ses étrangers. Surtout ses parcs. Là-bas, le temps que j’y avais passé était incomptable, les événements qui s’y étaient déroulés étaient indénombrables, le nombre de personnes que j’y avais rencontré était innombrable. Toutefois, un élément retenait mon attention. Là aussi, je ne l’avouais pas, mais il me manquait quelque chose, ou peut-être plutôt quelqu’un. Ma grand-mère ? Non, bien que c’était une personne que j’appréciais énormément. Ce n’était pas de ce genre de personne que je manquais. Quelqu’un d’autre. Au fond de moi, je savais son nom mais je ne le prononçais pas. J’étais à Black Valley maintenant, bien loin de Vancouver et de ce parc, bien loin de cette fille …

    Un bruit de verre cassé résonna dans la salle, me sortant de mes rêveries. Je tournai la tête vers l’autre côté du bar et je me figeai. J’étais devenu raide et mes yeux se voilèrent comme s’ils étaient éblouis. Je ne bougeais plus, et si j’avais eu envie de parler, aucun mot ne serait sorti. Là, assise sur une chaise, en train de me regarder, était une jeune femme qui ne m’était pas inconnue. Elle me murmura quelque chose que mes oreilles ne purent entendre mais que mon cœur pouvait comprendre. Je déposai mon verre sur le comptoir et m’avançai. Je ne décrochais pas mon regard du sien et je m’assis sur une chaise voisine. Elle me regardait d’un air qui signifiait ce qu’elle avait murmuré tout à l’heure.

    • Des complications. Sans cesse des complications. Je cherchais, j’ai trouvé, je découvre. Et toi, que fais-tu ici ?


    Il faisait assez noir dans la pièce. Les seules sources de lumières étaient quelques bougies, dispersées çà et là, et qui tendaient à s’éteindre. Les quelques personnes qui s’étaient agglutinées autour de la jeune femme repartaient d’où il venait. Je me trouvais donc seul, face à elle.

    Je ne cessais de la fixer. La revoir ainsi, devant moi, m’enchantait énormément. Elle était toujours aussi resplendissante. Mais par quelle folie le destin l’avait-elle amenée à Black Valley ?


    « Qui n’a pas connu l’absence ne sait rien de l’amour. »
    Ma grand-mère était une de ses personnes énigmatiques. C’était une personne comme on en rencontrait rarement. De temps en temps, elle me disait des phrases que je ne comprenais rien pour la plupart. Celle-ci, je venais seulement de la comprendre …
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MessageSujet: Re: You ran away and you took my heart   You ran away and you took my heart EmptyJeu 31 Déc - 16:47

    Une fois de plus, le hasard – ou le destin, qu’en savais-je – m’avait surpris. Agréablement surpris, même. La raison de ma venue dans ce bar était de trouver un jeune homme pour me faire oublier la réalité. Et ce n’est pas un homme que le hasard m’avait donné, mais lui. Lui, tout entier dans sa splendeur et son énigme. Peu à peu, l’usage de mes sens me revint. Le brouhaha incessant et infernal failli me faire perdre l’équilibre, mais le voir s’approcher de moi sans cesser de m’observer me paralysa sur place. Je ne pouvais quitter son regard. Je n’aurais jamais l’audace de l’avouer, mais ce dernier m’avait manqué. Énormément manqué même. L’envie de lui parler, de lui prendre la main et de rester ensemble me raviva des souvenirs d’avant, dans ce parc. Nous y régnions en seuls maîtres des environs ne craignant rien, pas même la pluie glaciale ou les tornades. Rien ni personne. Juste la tristesse du moment où nous nous séparions, pour nous retrouver cependant le lendemain. Cette impression de solitude à deux, d’abandon du monde entier, presque de supériorité par rapport aux autres qui ne vivaient pas cela, j’avais envie de la retrouver et de la revivre. Or, une seule personne avait le pouvoir de me donner cette sensation insolite, cette compensation à mes accès de colère incontrôlables. Un pouvoir bien étrange que je n’expliquais pas. Un pouvoir bien injuste, souvent donné à des personnes incompétentes, irréfléchies. Dans mon cas, j’hésitais souvent, mais péchais plutôt de l’autre côté. J’étais plus ou moins heureuse que ce pouvoir soit tombé dans ses mains. Plutôt plus que moins. Il émanait de lui quelque chose d’insaisissable. De sauvage. De pure. Et à cette « chose », j’étais dépendante. Depuis bien longtemps j’avais abandonné de saisir le pourquoi du comment vis-à-vis de Jonathan. Le mystère de sa vie, de lui-même et de cette étrange relation qui nous reliait l’un à l’autre restait entier pour moi, même après plus d’un an de fréquentation. Sa présence avait un effet appaisant sur moi. Son absence un effet destructeur. Et je ne pouvais rien y changer, autant parce que j’en étais incapable que parce que l’envie me manquait. L’attirance entre lui et moi n’avait aucunement diminuée au fil des jours, en tout cas de mon point de vue. Au contraire.

    Les mètres nous séparant diminuaient tandis que mon cœur se serrait dans ma poitrine. Je ne bougeais plus, comme si un geste brusque de ma part aurait pu lui faire peur et le faire fuir. Comme si d’une seconde à l’autre il pouvait s’envoler à l’autre bout du monde, renouvelant alors mon cauchemar et mes recherches futiles. Enfin, il prit place à mon côté. Tout ceci m’avait fait perdre le peu de conscience qu’il me restait. J’en avais oublié ma cigarette, et celle-ci se consumait lentement mais surement entre mes longs doigts tremblants, délicats. Au moment où il répondit à ma question qui me brûla le cœur, ma cigarette me brûla les doigts. Dans un frisson de douleur, je la lâchai et enfonçai ma main à l’intérieur de mon manteau pour cacher ma blessure, autant physique que moral à Jon. Je tentais de gardais une certaine fierté dérisoire devant l’homme qui m’avait enlevé ma raison. Mon cœur. Et pourtant, sa réponse n’avait rien d’insultant. Elle m’avait juste ramené brusquement à la réalité. Elle m’avait rappelé la raison pour laquelle j’avais quitté mon minable appartement. Raison qui m’apparaissait à présent bien vaine, ce qui m’amenait à penser que depuis deux semaines, j’agissais de manière bien frivole. De plus, sa réponse, très floue, ne m’expliquait pas grand-chose. Mais qu’attendais-je donc de cet homme énigmatique ? Une réponse toute faite, organisée en plusieurs points expliquant clairement et précisément la raison de son départ subite, sans une explication, laissant derrière lui une jeune fille perdue et une grand-mère prit par la peur de ne plus revoir son petit fils. Non, quelque chose m’échappait. Quelque chose m’échappait toujours, en qui le concernait. Il fallait constamment lire entre les lignes, comprendre l’implicite, chercher. Mais je n’avais pas la tête à cela, aujourd’hui.


      ●● Je comprends. J’aurais dû m’en douter, tu passes ton temps à chercher les complications. Mais le plus important est que tu as trouvé, n’est-ce pas… Je suis heureuse pour toi.


    Il y avait une pointe d’hystérie et de souffrance dans ma voix. Mes mots sonnaient faux entre mes lèvres tremblantes. Je mentais mal, aujourd’hui. Non, je ne comprenais pas. Non, je n’étais pas heureuse pour lui. Et je haïssais ces émotions indomptables. Elles me faisaient perdre le contrôle de moi-même et m’empêchaient ainsi de les cacher. J’étais victime de mes propres sentiments. Ils me rendaient aveugle, exagéraient les moindres détails, jusqu’à transformer la réalité. Et pas toujours à son avantage, ni au mien d’ailleurs. Autrement dit, mes émotions altéraient ma raison.

    Ainsi, je ne sus que répondre à sa question. Je ne me résolvais pas à le lui avouer. Ma carapace s’était endurcie, m’empêchant de me dévoiler malgré mes émotions de plus en plus envahissantes et incontrôlables. Des émotions bien contradictoires. J’étais en colère contre moi-même, et surtout contre lui. Il avait ce pouvoir inexplicable sur moi, ce que j’avais encore beaucoup de mal à admettre et à accepter. J’avais honte de ma conduite, et de la façon dont je… ou plutôt il m’avait retrouvée. La joie de le revoir s’opposait totalement à ma tristesse crée par mes souvenirs, et à ma colère. Enfin, j’avais peur. Peur de le perdre à nouveau, et peur du moment où mes émotions dépasseraient ma fierté pour briser ma carapace – car ce moment allait arriver, tôt ou tard. Dans le moment présent, j’essayais de faire abstraction de mon intériorité. Ne trouvant aucun mot adéquat pour expliquer ma présence ici, je me contentai de le fixer droit dans les yeux, sans but d’affrontement, plutôt pour le laisser lire à travers moi. Il le devinerait sans peine, s’il l’ignorait vraiment. Je ne pouvais voir mon propre regard, mais je ne pouvais mentir avec mes yeux. Ils devaient donc être un beau et triste mélange de mes émotions contradictoires et abstraites.


Encore désolé du retard xp.
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MessageSujet: Re: You ran away and you took my heart   You ran away and you took my heart EmptySam 2 Jan - 3:33

    Le silence persistait en moi. J’aurais voulu affirmer haut et clairement ce que je pensais, mais je ne le pouvais. Une voix en moi m’enseignait la patience. J’étais toujours assommé par cette rencontre mais en même temps j’étais content. Mais qu’était-elle venue faire à Black Valley ? Apparemment, elle ne daignait pas me répondre. Toutefois, j’avais l’impression de connaitre la réponse …

    Il me fallait l’avouer, la voir ici, en face de moi était assez inattendu. J’étais encore assez déboussolé et je ne savais pas quoi lui dire, malgré l’envie incessante de lui parler. J’avais tant de choses à lui raconter, tant de choses à lui faire découvrir, tant d’instants à l’admirer que je restais sans voix, figé. J’aurais pu tenir la conversation pendant des heures de suite, lui expliquer dans les moindres détails les raisons de mon départ hâtif et peut-être dans cet élan lui avouer ce que je ressentais pour elle. Cependant, il m’en était impossible pour l’instant. Il me restait une marche à monter, mais celle là était de loin la plus coriace.

    Le silence faisait mauvaise compagnie. Une fausse note résonnait en lui, voguant d’un air indécis, laissant tout le bar perplexe. Les quelques habitués avaient délaissé durant quelques secondes leurs boissons et avaient regardé la scène. Ils avaient écoutés les brèves répliques et ne montraient aucun signe de lassitude, et n’avaient pas l’air impatient de continuer leur beuverie.

    Je ne pouvais décrocher mon regard du sien. J’y voyais une lueur qui brûlait éperdument, oh combien différente de celle que j’avais tant appréciée à Vancouver. Mais cette différence était-elle favorable ? Oui … Je comprenais qu’elle n’était pas venue ici que pour une simple visite et qu’elle avait quelques intentions bien déterminées. Était-ce une coïncidence qu’elle se retrouve dans le village où j’avais pris domicile ? Je ne croyais pas à ce genre d’hasard. Même si je ne lui aurais jamais avoué clairement, j’aurais espéré qu’elle revienne pour moi. Mais qu’imaginais-je là ? Cette fille n’en avait probablement rien à foutre de moi. J’étais Jonathan Peter Bass, un humain perverti, un loup en quête d’un monde propre et juste, un loup-garou égaré. J’étais quelqu’un qu’on préfèrait éviter à l’odeur des traces laissées, quelqu’un qu’on aimait mieux ne jamais croiser, quelqu’un qu’on appréciait autant esquiver, de peur qu’il incarne le Mal en personne. Qu’était devenue la race humaine ? Rien du tout … La différence nourrit la haine, est-ce pour cela que le mystère et l’incompréhension sont synonymes de mal ? J’étais quelqu’un de mystérieux, je devais m’y faire. Toutefois, étais-je pour cela un être à fuir ? J’en doutais, seulement les humains étaient tombés à un point tellement bas que même leur idiotie de pouvait pas les relever. Ils étaient tellement compressés par la haine qu’ils ne voyait que ce que leurs yeux leur permettaient de voir et préfèraient ne pas s’aventurer plus loin. De ce fait, toute une partie de la vie leur étaient cachés.

    Toutefois, dès le premier instant que mes yeux avaient croisés les siens, j’avais senti que cette fille m’était semblable sur quelques points. L’incompréhension de ce monde défectueux, une rage dominante contre les Hommes. J’éprouvais un sentiment différent en la regardant, en l’entendant s’exclamer ; je savais que cette fille, je ne pouvais m’en séparer. Je le savais pourtant je n’avais pas respecté mes profondes intentions et j’avais agis par instinct. J’avais fait ce que je croyais être bon mais je m’étais trompé. Depuis ce mois à Black Valley, la vie avait un goût fade ; elle manquait de sel et de poivre et je venais de retrouver le sel ...

    Je m’étais fait à l’idée de ne jamais la revoir, qu’il fallait tourner cette page enchanteresse de mon histoire, qu’il fallait que je reprenne ma plume en main, respirant un bon coup et que je me mette à écrire un nouveau chapitre de ma vie. Seulement, le courage m’avait délaissé. Je m’étais tout de même obligé à penser que cette fille ne m’était pas importante et que je pouvais très bien vivre sans elle. Je savais que je me mentais, j’étais certain que cette fille avait prit domicile de mon cœur, qu’elle s’y était bien installée et qu’elle ne le quittera probablement jamais. Toutefois, j’avais fermé les portes de l’amour et je m’étais mis à me cacher la réalité ingrates des choses, je l’aimais ! Et puis voilà, le destin s’en était mêlé. Cette fâcheuse manie de s’enchevêtrer dans mes affaires me dérangeait. Je ne l’avais pas appelé, je ne l’avais pas invité, je ne l’avais même pas souhaité. Quoi qu’il en soit, il était arrivé et avait tout fait flanché. Il avait fallu qu’il guide mes pas jusqu’à ce bar, qu’il amène cette fille à Black Valley pour que tous mes efforts soient réduits en quelques secondes au néant. En même temps, je le remerciais un peu, bien que cela faisait longtemps que je ne croyais plus à ces histoires de chance, de destin, d’avenir. Moi seul pouvais guider ma voie, personne n’a de chemins prédéfinis. Il y a juste une esquisse qu’il faut en suivre, mais les contours sont flous et seule notre plume peut les encrer sur notre voie. Parfois, il m’arrivait de douter de cette théorie mais je restais tout de même sur la même longueur d’onde.

    Je me levai de la chaise et m’avançai vers Janae. Je m’assis sur une chaise plus proche et je commençai à parler d’une voix basse afin que tous les clients n’entendent pas.

    • Je suis désolé … Je n’aurais pas dû partir comme cela … mais il le fallait.


    Je n’achevai pas ma phrase, la laissant momentanément en suspend. J’étais plongé dans mes songes délirants et je me débattais pour en sortir. Sans effet … J’étais prisonnier de moi-même et aucune aide extérieure ne me serait d’un grand secours. Je perdais raison inutilement. De plus en plus, le doute était accablant et réduisait la liberté. Mon âme était emprisonnée et mon corps en était les barreaux. Tant qu’aucune coordination ne sera affectée, aucune compatibilité ne sera envisageable. Je devais faire des choix, mais cela me peinant d’en faire. Je n’aime pas les bifurcations, je préfère les chemins rectilignes. Mais, depuis peu, j’étais conscient que rien n’était droit chez moi. Alors que je venais de m’installer et que je m’étais à peine adapté à Black Valley, il fallait qu’un événement me replonge dans mes tourments. Le cycle infernal de la vie reprenait son court, alors qu’il avait été mis ingénieusement en pause.

    • Pourquoi es-tu venue ?


    Je reposai la question, j’attendais toujours la réponse, même si elle tardait à venir. La patience, le mot contrôle.



    « Parfois, je me questionne sur le sens de l’amour… »
    « Jonathan, tu es bien étrange comme petit-fils ! »
    « Je sais … L’étrange est parfois même plus étrange qu’on ne le croit. »
    « Si tu le dis … »


    Elle me manquait. J’avais passé une grande partie de ma vie chez elle. A maintes reprises, elle m’avait relevé, s’offrant comme accoudoir. Je l’aimais comme si c’était elle ma mère. Je savais qu’elle ne me comprenait pas. J’étais pour elle mystérieux, étrange, anormalement rationalisé. J’étais une énigme et je le suis toujours. Je ne savais pourquoi mais durant les moments de doutes, je repensais à elle et des flash-back s’offraient à moi, ne me laissant pas indifférent. A vrai dire, je trouvais le moment assez mal choisi pour revivre mon passé mais je ne m’y opposais pas, même si j’aurais préféré vivre mon présent.

    Parfois, la peur de perdre quelqu’un qui vous est cher vous ronge à tel point que seule l’idée d’une séparation coûte autant qu’un poignard dans le dos. Je ne voulais pas la laisser repartir mais en même temps, qu’avait-elle comme avenir ici ? Ce n’est pas une vie pour une simple humaine, immergée dans des querelles ancestrales. Mais des fois, ne fallait-il pas mettre la raison un peu de côté ? Il était clair que la laisser quitter Black Valley sans faire ni bruit ni geste me serait coûteux mais si tel devait être son futur, je m’y ferai … Et puis, qui dis qu’elle a l’intention de repartir ? Personne …

    Des murmures affinés me chatouillaient les oreilles. Était-ce le vent ? Je repoussai cette hypothèse vu que nous étions à l’intérieur d’un bâtiment. Tout de même, je crus reconnaitre le rythme mélodieux de la brise tardive. Peut-être me trompais-je … Était-ce le bruit de mes propres réflexions ? Parfois, je me demandais si la folie n’était pas la seule raison qu’il restait au fou de vivre ; si tel était le cas, alors fallait-il réellement avoir perdu toute cohérence pour avoir une raison de vivre ?

    Chut ! J’entends de nouveau le vent. Il me dit d’avancer …
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You ran away and you took my heart Vide
MessageSujet: Re: You ran away and you took my heart   You ran away and you took my heart EmptyVen 8 Jan - 23:24

    Nous offrions aux personnes présentes dans cette salle un joli spectacle de retrouvailles. Retrouvailles assez spéciales, que certains prendront comme froides mais que je préférais qualifier d’ambiguës. Intenses émotionnellement, aussi. Mes sentiments changeaient d’une seconde à l’autre en fonction de son regard ou de son sourire, passait de la frustration au désir, de l’insolence à l’amertume. Je me rappelais encore avoir assisté à certains coups de théâtre les jours précédant dans ce bar, où tout pouvait arriver. De simple spectatrice j’étais devenue actrice. Ce fait m’agaçait. J’aurais préféré mille fois un lieu plus éloigné favorisant la discrétion à la démonstration. Nos retrouvailles pouvaient vite virées en scène de ménages comme en véritable retrouvailles d’anciens amants, tels j’en avais été le témoin à plusieurs reprises. Les deux me gênaient. J’avais rêvé de ce moment mille et une fois la nuit et même le jour, les yeux ouverts, et aucuns de mon songes ne ressemblaient à ceci. Evidemment, aucun de mes rêves ne pouvaient être qualifiés de « traditionnels », réservés aux jeunes demoiselles « traditionnelles ». Question de logique. Non, je n’avais pas songé aux scènes américaines passées au ralenties, où les deux acteurs couraient l’un vers l’autre pour s’enlacer fougueusement après deux jours de séparation cruels. J’avais rêvé de son étonnement, de sa rage, de sa joie aussi. J’avais prédit ma colère, mon désir de lui reparler comme avant, de l’embrasser et balayer ainsi notre éloignement, si futile après tout ! Ce délire psychique n’avait rien à faire là-dedans, et je regrettais ne pas être maître de moi-même en cet instant. Mes pensées étaient loin d’être adultes et réfléchies. Je réfléchissais et assimilais les évènements comme une gamine de douze ans. Néanmoins, j’avais conscience que mon état de délire n’était que passager, et j’attendais patiemment que ma vraie raison me revienne. En attendant, j’en profitais pour l’observer intensément. Je me rendais compte à quel point la finesse de ses traits m’avaient échappée ces derniers mois. A quel point la profondeur de son regard me troublait. Et à quel point son sourire m’avait manqué. Et pourtant, l’idée qu’il restât de marbre devant moi, alors qu’il ne m’avait plus vu, plus parlé, plus touché depuis deux semaines – bien longues à mes yeux – ne me quittait plus. Presque à en devenir une obsession, et pas nécessairement très agréable et saine…


    Si cette force troublante et perceptible seulement par moi-même empêchait mon regard de diverger du sien, ne fut-ce pour une seconde, j’aurais sans hésiter quitté cet endroit pour aller déverser ma haine ailleurs. Loin des regards curieux et indésirables. Loin de son regard, surtout. Aussi grand avait été mon plaisir et mon étonnement de le retrouver, aussi froide était ma colère devant son visage impassible. Comme s’il vivait ailleurs, dans un tout autre monde, pas plus joyeux que celui-ci. Depuis notre rencontre, rare avaient été les moments où il perdait son inébranlable calme, son regard lointain, si ténébreux et envoutant à la fois. J’arrivais difficilement à poser des mots sur mes sentiments le concernant, mais je pouvais clairement affirmer qu’en cet instant précis, j’aurais été capable de beaucoup pour le faire réagir, et peut-être enlever ce voile cachant ses pensées et ses sentiments les plus profonds. Comprendre ainsi ses plus intimes secrets – quoi que, je n’étais pas certaine de vouloir aller jusque là… il y a des choses qu’il vaut mieux garder secrètes, n’est-ce pas. Je lui aurais volontiers lancé mon verre dans la figure. Je lui aurais crié à quel point son départ m’avait détruite, malgré lui, malgré moi. Enfin, je lui aurais murmuré à l’oreiller ce que jamais encore je n’avais réussis à lui avouer… Tout ceci n’était que foutaise, pensées en l’air inutiles. Cette folie passagère avait beau détériorer mon esprit, mon corps restait sous mon propre contrôle. Et j’y tenais, simple question d’honneur. S’il daignait rester dans son état passif, soit ! Mais je n’allais pas lui faire le plaisir d’être compréhensive et indulgente envers lui. Que Dieu l’emporte !

    Cette situation ne m’était pas coutumière et se différenciait des autres par son changement de rôle. En effet, la coutume voulait que ce soit moi qui fasse perdre raison à la gente masculine, et non l’inverse. Mais il ne s’agissait pas de n’importe quel garçon, et j’étais plutôt bien placée pour le savoir. Rien ne prouvait que sous ce visage énigmatique et à l’apparence sereine ne se cachait pas tout autre chose. Lorsque Jonathan Bass entrait en jeux, il fallait s’attendre à beaucoup, et ne pas tenter de penser à sa place. C’était dérisoire, car impossible. En ce moment précis, il pouvait tout aussi bien être la victime d’une blessure intérieure douloureuse qu’être en proie à des souvenirs en tout genre. A moins qu’il soit enragé de me retrouver ici, et que sa seule envie était de me voir quitter Black Valley. A cette pensée douloureuse, je tressailli légèrement et balayai aussitôt cette idée. Elle m’insupportait.

    C’est alors qu’un phénomène assez troublant se produit. Mes ne furent plus totalement miennes. Je les sentais s’effacer lentement, emportant avec elles leurs démons intraitables. A l’inverse, d’autres venaient délicatement se faufiler à travers moi, elles me submergèrent. Je tentai de comprendre d’où provenait cette foule d’émotion qui ne m’appartenait pas, mais abandonnai bien vite. Je l’ignorais. Je pus seulement constater l’effet d’appaisement qu’elle me procurait et laissai cette nouvelle sensation remplacer les miennes, plus sauvages, avec joie. Appaisement nuancé toutefois par une curieuse note d’étonnement et de doute. Je n’y fis guère attention, et profitant de mon nouvel intérieur, j’écoutai d’une oreille distraite les paroles de Jon’. Un sourire réservé, presque triste étira mes lèvres. Je pris alors un ton posé, qui ne m’était pas vraiment propre car il n’était que le fruit de ces émotions volées :


      ●● Je comprends. Mais je ne comprends pas pourquoi tu ne m’as pas informé avant. Je croyais…


    Je m’arrêtai. Que croyais-je donc ? Moi-même je n’en étais plus certaine, à présent. Tout n’était peut-être qu’illusion, après tout. Mais le poids de mes souvenirs était grand, à défaut de renier le futur. Il m’apparaissait trop sombre et je préférais ne pas y songer plus qu’il ne fallait. Je me raccrochais à quelque chose qui n’était peut-être plus d’actualité, parce que je ne trouvais rien d’autre à quoi me raccrocher en cet instant. Je me mentais à moi-même en laissait planer le doute de ses sentiments vis-à-vis de moi… de nous. Je me faisais croire que tout était encore possible parce que sans cette petite lueur indécise d’espoir, je n’aurais su où aller. D’ailleurs, je n’avais rien trouvé de mieux à faire que de le poursuivre pour ne pas re-sombrer dans la solitude et la désolation. Le néant. Malheureusement pour lui, et peut-être pour moi, je l’avais choisi pour être mon souteneur. Et jamais je ne regretterais ce choix. Malgré les apparences, je gardais une confiance absolue en lui. Il représentait énormément pour moi, et j’attendais peut-être trop de lui…

    Au même moment, la totalité des émotions volées me délaissa comme elle m’avait submergée quelques secondes auparavant. Ma nervosité reprit sa place habituelle dans mon propre corps, plus folle encore. Je restais déconcertée devant cette injustice. Pourquoi m’avoir offert un moment de soulagement pour me le reprendre ensuite ? Et surtout, que s’était-il passé ? Lentement, je commençais à croire que la folie avait réellement eus raison de moi. M’étais-je inventé cette sensation de plénitude ? Quoi que, plénitude était peut-être une exagération… Mais en comparaison, il s’agissait réellement de cela. Je formai une liste de question à éclaircir plus tard dans un coin de ma tête, tout en espérant ne pas avoir atteint grave de l’hystérie, puis me reprit tant bien que mal pour répondre enfin à la question de mon ami retrouvé. Mon seul vrai ami.


      ●● Je cherche. Comme toi… A la différence près que je ne trouve pas…

[HJ : je me répète, désolé du retard xp. & pas terrible tout ça, & pourtant j'suis inspirée :/. Bref, pas très compréhensif lol, si tu as des questions à propos de certains passages, n'hésite pas]
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MessageSujet: Re: You ran away and you took my heart   You ran away and you took my heart EmptySam 9 Jan - 19:39

    La finalité était inévitable. Tout être, quel qu’il soit, devait un jour rejoindre le haut. Même pour ceux qui se croyaient intouchables par le destin, même pour ceux qui disaient que la mort était insensée pour eux, même si vous faisiez partie des gens inhumains, la mort vous touchera. Certains proclamaient et évoquaient leur immortalité. Foutaises, la finalité reprendra ses droits, peut-être après beaucoup plus de temps que les simples humains. Peut-être après avoir combattu les pires maladies, peut-être après s’être battu dans des luttes épiques qui resteront gravées à jamais dans le livre de l’Histoire, mais quoi qu’il en soit, le haut vous rattrapera. Je me rappelais d’un jour avoir croisé un vampire – ou un sorcier, ma mémoire flanche – m’ayant certifié qu’il vivra éternellement. Quelques minutes plus tard, il gisait à mes pieds dans son propre sang. Comme quoi, même si la vieillesse ne les attint pas, d’une manière ou d’une autre, ils mourront. J’avais peut-être commis ce jour là un acte punissable mais il fallait remettre à ce bonhomme les idées en place. Depuis ce jour, je comptais une victime en plus dans mon livre, un idiot en plus tué pour le plaisir. En étais-je fier ? Tel était la question …

    Toutes ces pensées dérisoires pour l’instant me revenaient en voyant un tableau pendu au mur opposé. Il représentait une scène où un groupe de loups-garous étaient en train de massacrer un groupe de gens. Ce tableau était-il ici par hasard ? Je ne croyais pas au hasard, s’il était là, c’est qu’il voulait démontrer quelque chose. La cruauté des Bass ? La raison pour laquelle ils avaient été précédemment bannis ? Parfois, il m’arrivait à avoir honte de ce que je suis. J’étais un Bass, j’étais un humain, un loup et un loup-garou ; je ne pouvais le nier, je ne pouvais le changer. Des fois, je rêvais une vie normale, faire partie des gens normaux. Serais-je pour autant plus heureux ? Je l’ignorais … J’étais un loup-garou, quoi que j’en veuille et je ne pouvais rien y faire. J’avais envie d’avouer tout à Janae, mais je n’y arrivais pas. Comment allait-elle réagir ? Allait-elle me fuir ? Il était vrai qu’un loup-garou, c’était assez repoussant et que c’était dangereux de passer sa vie avec une de ses créatures. A chaque pleine lune, il pouvait se changer en cette bête, oublier complètement les personnes à qui il tenait et dans un élan de fureur les tuer. J’avais failli la perdre une fois, toutefois elle était revenue mais qui me dit qu’elle allait rester ? Personne … Si de plus je lui avouais ma vraie nature, ne serait-ce pas une raison de plus de fuir ?

    Je repris ma concentration en entendant ces paroles. Je restai durant quelques instants sans mot. J’écoutais sa voix, magnifique, pure comme du cristal. Etrangement, je n’y avais pas encore fait attention ; toutefois, là, j’en restais muet. Elle m’avait horriblement manqué pendant ces deux semaines, mais où trouverais-je la force de lui avouer ?

    • Il nous arrive d’avoir des tâches que nous seuls pouvons accomplir. C’était ici mon cas. De plus, le danger était imminent, et il l’est toujours. Que folle soit l’idée que tu as eu de venir ici …


    Je n’ajoutai rien. J’aurais presque vendue mon âme pour qu’elle me réponde clairement qu’elle était revenue pour moi. Cependant, ce n’était peut-être pas le cas. Je lui aurais peut-être même avoué que j’étais un loup-garou si elle venait à se rapprocher de moi et me chuchoter à l’oreille les quelques mots que j’attendais secrètement avec une impatience démesurée. Je me levai de ma chaise et allai au bar chercher à boire. En attendant d'être servi, je jetai un regard derrière moi et aperçus qu’elle avait l’air plongée dans des songes autant emmêlés que les miens. Je revins et m’assis à une autre chaise, encore plus proche de la sienne. Je déposai les verres sur la table de bois massif et replongeai mon regard dans le sien. L’immensité était tellement vaste que mon regard dans le sien était aussi infime qu’une goutte dans mon verre …

    Une lueur m’enivrait, me laissant silencieux. Ses yeux étaient si profonds que je m’y perdais facilement. Ils avaient quelque chose que tous les autres ne possédaient pas. Ils avaient un code bien à eux, un halo d’une grande signifiance y siégeait et ce n’était qu’après de nombreuses tentatives que j’arrivais à m’en décrocher. Si le temps m’était donné, je resterais bien assis sur cette chaise des nuits entières, voué au silence, mais m’endormant dans son regard. A l’instant même, je me demandais comment j’avais pu partir sans rien lui dire, pourquoi je ne lui avais pas proposé de me suivre. Je m’étais trompé, même si je savais que j’avais agi de la sorte pour la préserver. Le danger était inscrit en temps que premier résident à Black Valley, il ne fallait pas l’oublier. Tout de même, j’aurais pu la protéger…

    Parfois, je me dis que mon chemin est encore bien long, qu’il est semé d’obstacles que seul le destin sait si je les passerai. Un jour, j’en étais même venu à me demander si le destin lui-même savait ma finalité, tant ma vie était entremêlée.

    • Tu sais, je ne suis pas certain d’avoir trouvé. Il me manque un élément-clé, celui qui déclenchera la suite. Toutefois, je viens à penser qu’il est peut-être ici même, dans ce bar, devant moi …


    De nouveau, mes pensées s’échappèrent des limites que j’avais précédemment instaurées. Mon esprit divaguait entre les frontières du possible et de l’impossible, errant sans fin. Il y a peu, je m’étais fixé un idéal à respecter, à suivre à la règle près. Parfois, je me demandais si c’était là qu’était cachée la clé de la réussite, mais j’en doutais toujours. Ce n’était pas possible de parvenir à ses projets par l’intermédiaire des rêves et des songes. Voilà ce qu’il me manquait, un peu de crédibilité. J’entreprenais tant de choses immatérielles que je débutais même à douter de la distinction que je portais entre le réel et l’irréel. A Black Valley, je perdais mes marques et mes repères. Je me perdais en moi-même. Je ne savais plus différencier le vrai du faux et le faux du vrai. Je ne parvenais plus à me situer dans tout cela.

    • En y réfléchissant, je me rends compte que je m’étais trompé. J’en suis désolé Janae. Toutefois, les faits sont là et je ne peux les changer. Je me rappelle d’une chose, les dernières paroles que ma grand-mère m’avait dites avant que je m’en aille : « L’amour est comme une fleur, il vit. Si on le prend trop tôt, il ne sera pas assez épanoui ; par contre si on le prend trop tard, il sera fané. Comme une fleur, il dégage une odeur et il faut savoir la décrypter. Tu n’as qu’une chose à faire, Jonathan, le prendre à temps ! ». Je n’avais pas compris ces phrases car je n’avais jamais parlé d’amour avec elle. Toutefois, ses paroles m’avaient confirmé une chose, ma grand-mère était aussi énigmatique que la vie elle-même. Mais, Janae, maintenant, je tends ma main, près à cueillir la fleur. Seulement, mon bras est trop court.


    Je respirai un bon coup. Je venais d’aligner plus de trois mots, ce qui était un exploit en soi. J’en étais même fier. Un bruit venant de la table d’à côté attira mon attention. Cet endroit était mal choisi pour faire de telles déclarations. Nous étions entourés d’humains saouls et ils étaient tous dans un état pitoyable. Je n’y portai plus d’importance et mon regard revint se fixer dans celui de Janae.

    Le fantôme qui séjournait en moi se réveilla. L’âme pervertie qui siégeait à sa place émit un crissement. J’approchai ma chaise de la table et l’avançai vers Janae. Je laissais mon instinct avancer les pions, lui faisant entière confiance, et j’attendais le verdict. Je tendais de nouveau mon oreille au vent, même s’il ne pouvait pénétrer dans le bar, j’entendais la brise claquer sur les volets du bâtiment. J’écoutais les pulsions qui bouillonnaient en moi et qui me suppliaient de sortir. Que devais-je faire ? Ignorer mon attirance à jamais ou enfin lui prouver mes sentiments ? Des envies me frappaient à l’intérieur et j’étais conscient que je ne saurai pas les repousser éternellement. Je n’avais pas le choix, malgré le dilemme qui se proposait à moi, il me fallait avancer. Et ce fut ce que je fis. Je sentais sa frêle respiration venir chatouiller mon visage. Je présentais sa présence, mes sens en alertes, m’indiquant une proche présence. Toutefois, ils ne savaient pas que cette présence était voulue. Un frisson m’échappa, malgré moi. Mes pensées se clarifiaient et j’avais de nouveau un but, l’aimer.

    Le bar résonnait d’un bruit incertain et dérangeant. Toutefois, je n’y portais attention. Dans mes rêves qui m’avaient poursuivis jusqu’à aujourd’hui, c’était assez différent. J’avais imaginé nos retrouvailles au milieu d’un parc ensoleillé de Vancouver dans quelques mois, et oh combien bonnement fêté ; pas lors d’une sombre soirée, dans un café déserté de tout âme en paix avec sa conscience et apprivoisé par une bande de saoulés. Quoi qu’il en soit, le destin en avait ainsi choisi la note, nous n’avions qu’une chose à faire, respecter ses choix. Son souffle me touchait et émanait en moi des frissonnements ininterrompus. Je m’approchai. Comme si elle aussi voulait jouer, elle avança. L’espace nous séparant n’était que moindre. Nous avions qu’une tâche, le réduire au néant. Et je n’allais pas refuser une telle proposition. Ses lèvres m’attiraient sans cesse et une provocation pareille ne se contournait pas. De toute façon, je n’avais pas l’intention de l’éviter. Si les clés de la roue du temps était en ma possession, j’aurais stoppé net toutes les horloges de Black Valley afin d’immortaliser ce moment que j’avais tant de fois rêvé durant ces deux semaines. J’aurais voulu que jamais mes lèvres ne se détachent de les siennes. Malheureusement, comme chaque chose, tout a une fin, même les instants les plus divins. C’était comme la concrétisation de toutes mes souffrances internes vaillamment combattues pendant cette quinzaine de jours. Au moins une personne sur cette fichue terre me portait de l’attention. A moins, que ce moment, elle ne le vivait qu’à moitié.

    La nuit vint nous perturber. Par les hautes fenêtres du bar, les rayons de la lune venait me chatouiller les narines. Aujourd’hui, je devais résister.



    « Le goût de ses lèvres avaient une résonnance céleste. La vie reprenait son court. Maintenant, les dés lancés, j’allais suivre le chemin qui m’était tracé à une exception près ; j’étais, je suis et je serai toujours le seul et unique maitre de moi-même. »

    Je reposai mon verre sur la table et pour la énième fois, je me préparais à savourer les abysses de ses yeux. Toutefois, il me restait une chose à faire avant. Je me retournai vivement vers elle, repris ses lèvres avec une conviction, ne plus jamais les lâcher !
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MessageSujet: Re: You ran away and you took my heart   You ran away and you took my heart EmptySam 16 Jan - 18:04

    La lune montait dans le ciel à un rythme régulier et lent. Le rythme du temps indocile, récalcitrant et encore très confus au regard humain. Définition qui convenait particulièrement bien à Jonathan. Et à moi-même, je devais avouer. Nous représentions chacun ce que la société appelait des marginaux, des cas. Ce genre de personnes échappant au moule universel et obligatoire. Évidemment, on évitait de constater ce dernier point. Surtout, il fallait préserver cette image ouverte et fraternelle de ce monde d’hypocrites et de racistes. Je n’avais jamais agi, parlé, pensé comme la plupart des gens et représentais donc une exception à la règle à remettre dans son moule de toute urgence. Malheureusement pour eux, heureusement pour moi, il était trop tard pour mon cas déjà avancé. A l’orphelinat, je représentais donc un trouble fait. Dès lors, ils avaient évité de m’exposer à la société. J’aurais pu tenter de ramener des personnes instables à ma cause contre l’esprit critique humain, voyons ! Il m’avait fallut du temps pour comprendre le système, et je n’avais pas encore tout à fait digérer cette découverte. J’avais pourtant facilement digérer le fait de représenter un trouble fait. Une marginale. Un cas. Car tout cela voulait dire la même chose : j’étais différente . Or, si la différence engendrait la peur chez la plupart des personnes, elle m’enchantait. La rencontre de Jon’ m’avait prouvé qu’il existait plusieurs phénomènes dans mon genre. Il n’était pas difficile de déchiffrer dans l’iris de ses yeux cette différence si évitée faisant de lui une personne à part. Comme moi. Ce qui constituait une raison de plus pour le ne pas le laisser m’échapper. Ce n’était pas seulement une question de hasard si nous concordions si parfaitement. Du moins était-ce vrai il y avait à peine deux semaines…

    Les minutes s’écoulaient lentement sans différence distincte, à tel point que je n’y prêtai aucune attention. Plusieurs minutes étaient passées pendant lesquelles nous avions échangé à peine trois phrases, et très abstraites. Le silence semblait être notre seul moyen d’échange et il régnait à présent en maître absolu entre nous. Jon’ cherchait les mots justes pour s’expliquer, je le devinais à présent à la façon dont il détournait son regard derrière moi, lui donnant un air encore plus songeur que d’habitude. Le voir ainsi ne pas savoir par où commencer me donnait un plaisir sans égal. Je le voyais rarement hésité, et ce simple fait prouvait qu’il y avait quelque chose en lui d’humain – ce dont j’avais tendance à douter, parfois. Alors, j’attendais, sans me décider à prendre la parole. Je daignais la lui laisser, ne cherchant au fond que savoir la raison de son brusque départ. Ou oserais-je dire de sa fuite... Car en deux semaines, j’avais eus où tout le triste loisir pour émettre plusieurs hypothèses sur la question. Et celle qui me revenait constamment en tête n’était pas pour me plaire : il serait parti à cause de moi. Notre relation devenant de plus en plus intime, il avait pris peur, parce que tous les hommes ont la crainte des relations sérieuses, de se voir caser comme il disait si formellement. Bien que la nôtre fut loin, bien loin d’en devenir une, j’y avais songé. Cette idée avait pu lui effleurer l’esprit, et il l’avait fuit lâchement sans même réfléchir à ce qu’il laissait derrière lui. Plutôt vivre dans l’abstrait que dans le concret, n’est-ce pas ? Ainsi, gardons toujours un échappatoire, ne sait-on jamais où le destin nous emmènera. Ça, c’était ce qu’il se tramait dans la tête d’un homme normal. Et c’était là que mon hypothèse coinçait. Car Jonathan était tout, sauf un homme normal. Néanmoins, je ne pouvais me résoudre à m’enlever cette idée de la tête, aussi accablante fut-elle. Elle ne me plaisait pas, certes, je ne pouvais pas lui enlever sa crédibilité. Pourtant, je persistais à croire en lui et à le suivre. Si j’avais appris une chose durant ma longue et triste enfance, c’était qu’il ne fallait jamais perdre espoir. Tant qu’il y a de l’espoir, il y a de la vie, même si celle-ci ne montrait pas toujours ses plus belles facettes. Et ce moment précis, silencieux, à un mètre à peine de lui me suffisait à y croire et à apprécier cette chienne de vie.

    Mon combat intérieur s’apaisait. Lutter contre mes sentiments s’avérait impossible. Je n’avais pas déclaré forfait, j’avais seulement accepté l’idée de craquer, à un moment où un autre. Quel côté allait l’emporter, là était la question. Ma rancune ou mon désir ? Je l’ignorais et préférais laisser au destin la décision de cette victoire conséquente. Elle dépendait avant tout de lui, à vrai dire. Et alors que mon sentiment rancunier à son égard dépassait tout jusqu’ici, sa dernière phrase me fit sourire de contentement et mes pulsions s’amplifièrent instantanément. Que folle soit l’idée qui m’avait conduite jusqu’ici, m’avait-il dit. La première façon de traduire cette constatation était qu’il regrettait ma venue. La deuxième, qu’il se tramait bien quelque chose ici de pas très catholique et qu’il s’inquiétait pour moi. Je n’avais rien à faire là-dedans, après tout... Et, étrangement, je n’hésitai pas à la traduire de cette dernière manière. Il y avait une lueur dans ses yeux qui ne mentait pas. Et qu’il s’inquiète pour moi me fit sourire.

    « Que folle soit l’idée j’avais eu de m’accrocher ainsi à un homme », répondis-je intérieurement. Je me contentai cependant de lui offrir un sourire malicieux en guise de réponse. Qu’il le traduise à sa façon, après tout. Il me connaissait.

    Cela ne sembla cependant pas lui suffire, car il se leva et quitta sa place. Pendant un instant, mon pouls s’accéléra subitement et je ne doutai pas que mes yeux furent pris d’une frayeur intense. Allait-il quitter cette pièce pour ne plus jamais revenir ? Osait-il renouveler cette fuite à l’autre bout du pays ? Je ne sais pas si j’aurais trouvé l’espoir suffisant de le suivre une seconde fois. On ne peut rien contre des sentiments inexistants. Ce malentendu m’apparut suffisamment tôt pour ne pas anéantir son attrait. En effet, il revint un verre de porto à la main, le regard plus ténébreux encore, il me semblait. J’aurais pu y passer des heures à m’enivrer de leur faveur complexe, à la fois gravée d’histoires dramatiques et des douleurs rencontrées en fil des années, agrippées à son âme qui témoignait de son vécu. Et puis, voilé derrière cela, ce gout délicat, pur de sa sensibilité et de la passion qui l’habitait. Voilà ce qui me plaisait tant, chez Jonathan. Il ne suffisait pas de le regarder grossièrement pour le comprendre et le connaître. Il fallait rechercher au fin fond de ses yeux et de son âme, et ce pendant des heures, des jours, des mois…
    Malheureusement, je me vis contrainte de détourner le regard sous peine d’être dans l’obligation d’assouvir cette pulsion croissante en moi à une vitesse fulgurante. Quelle idée de réduire l’espace nous séparant ! Cherchait-il à provoquer le destin ? Si tel était le cas, c’était réussi. Mon désir surpassait, et de loin à présent, ma rancune de tout à l’heure. Je ne comprenais même plus d’où me venait cette animosité à son égard. Toutes mes pensées furent assaillies par le seul désir de restreindre plus encore cet espace, quitte à l’anéantir complètement. Et comme entre la pensée et le ressenti il n’y a qu’un pas, un sentiment de froid me submergea. Un froid qui aurait très bien pu se dissiper entre les bras chauds d’un homme. Il me fallut toute ma raison pour ne pas remédier à ce problème de cette manière. L’idée s’empara de mon esprit pendant plusieurs secondes. Ma respiration saccadée en témoignait, et malgré tout mes efforts pour la ralentir à un rythme normal, elle resta plutôt rapide. Lui ne fit rien non plus pour m’aider à éviter le pire. Ou le meilleur, tout dépendait du point de vue… Il ne cessait de me toiser du regard, cherchant le mien comme pour s’y bercer à son tour. J’étais faible, car je ne pus m’empêcher de détourner les yeux bien longtemps. Avant que je ne puisse craquer, il prit la parole, et je bénis silencieusement ce hasard. Pour finir, il semblait ne pas être si mal fait, ce soir.

    J’avais appris avec le temps à comprendre les codes insérés habilement dans son langage. Car souvent, sa façon de parler restait à son image : une énigme. Un peu comme l’expression « lire entre les lignes », il s’agissait d’écouter entre ses mots et de comprendre leur sens habilement dissimuler. Un art en soit. Et si cela m’avait posé quelque problème de compréhension dans le passé, je traduisais à présent sans difficulté les sous-entendus de Jon. Ces non-dits, comme je les appelle. Parfois mal, je l’accorde. Mais cette fois cependant, je ne doutais d’avoir parfaitement compris que je lui avais manqué, ces deux semaines. La clé dont il parlait ne pouvait être que moi – il y avait devant lui son verre de porto et moi, alors à moins qu’il s’était découvert un fort penchant pour la boisson, je ne pouvais me tromper. Je ressentis une vague de satisfaction comme j’en avais peu connue. Ainsi, ce que j’avais pris pour « fausses illusions » il y avait à peine quelque minute n’était pas aussi fausses qu’elles en avaient l’air. Mon espoir enfui au plus profond de moi se remit à briller de tout son éclat. Un éclat pénétrant et pur. Il me submergea, balayant au passage le reste de ma colère éphémère. Il m’en fallait peu pour tomber, comme pour renaitre. L’instabilité faisait clairement partie de mes traits de caractère, et j’en avais conscience. Aussi je prenais soin de ne pas y croire trop vite. Garder mes barrières encore un petit instant, le temps de me remettre complètement de mes émotions. Je ne pus cependant m’empêcher de répondre :



      ●● Et pourtant, tu n’as pas même besoin de le chercher, cet élément-clé. Paradoxalement, il est lui-même venu jusqu’à toi. Sans toi, il n’existerait pas.


    J’avais à peine prononcé cette dernière phrase, comme s’il s’agissait d’un secret, ou d’une honte. La vérité était que j’avais encore beaucoup de mal à avouer clairement mes ressentis. Ma remarque sembla le plonger dans ses pensées les plus confidentielles. Il se serait retrouvé près de sa grand-mère par pensée que cela ne m’aurait pas étonné. De l’indécision se lisait sur son visage. Cette fois seulement, je n’en éprouvai aucun plaisir. De quoi doutait-il ainsi ? Je préférais ne pas émettre d’hypothèse à cette question et en profitai pour le scruter plus intensément encore. Le fait d’être observer ainsi sans arrêt mettait la plupart des gens mal à l’aise, ou les rendait colériques. Ou au pire des cas, ils rentraient dans un courroux dont il valait mieux s’éloigner. Mais Jon’, infidèle aux règles universelles, ne paraissait aucunement dérangé par mon regard, au contraire même. Pour le plus grand bonheur de mes yeux. Les heures que j’avais passées à l’observer ainsi ne se comptaient plus depuis longtemps. Il s’avérait être un de mes passe-temps favoris. Et lorsqu’à la vue venait s’ajouter un autre sens bien particulier, alors ce n’était plus un simple passe-temps, mais un moment historique. Je souris à cette pensée. Je préférais l’hyperbole aux euphémismes, c’était une chose à savoir. Car à mes yeux, la vie ne méritait pas d’être rabaissée constamment par des « un peu » ou des « légèrement », mais devait plutôt être considérée à sa juste valeur, c'est-à-dire comme « infinie » et « intense ». Non que je louais la vie, plutôt que je la trouvais trop précieuse, cruelle et problématique pour se faire attribuer des qualificatifs aussi peu représentatifs de la dure réalité. Ainsi, ma joie se transformait vite en euphorie. Ma tristesse en dépression. Ma colère en véritable rage contre le monde entier. Mon affection en amour acharné.

    Ce fut lui qui me tira de mes pensées plus ou moins philosophiques. Après avoir brisé ce silence, pourtant loin de m’être pesant, il semblait ne plus vouloir perdre la parole. Je n’avais jamais été une adepte des grands discours. Les beaux parleurs, je m’en méfiais comme de la peste. Ils n’étaient que menteurs et hypocrites, et je savais de quoi je parlais. Parler pour ne rien dire, très peu pour moi. A mes yeux, il suffisait d’un geste, d’un regard, de quelques mots pour résumer les sentiments les plus inexplicables et inexpliqués. Pourtant, je l’écoutai avec une attention toute particulière. Parce qu’il s’agissait de Jonathan. Parce que s’il prenait la parole ainsi, c’était qu’il le fallait, qu’il en avait vraiment besoin. Je ne m’étais pas trompée. Plus il avançait, plus mon attention s’intensifiait. Jamais encore nous n’avions fait d’allusion à nos sentiments. Des caresses, un baiser volé à l’occasion, des paroles ambigües, des regards défilés et profonds. Nous nous limitions à cela, et je n’avais jamais ressenti le besoin d’aller plus loin… jusqu’à maintenant. Sa déclaration, au beau milieu du bar le plus populaire de la ville la plus étrange du monde me bouleversait au plus haut point. Jamais je n’avais rencontré un homme aussi surprenant. Jamais je n’avais ressenti pareil sentiment pour une personne autre que ma grand-mère. Et étrangement, ce sentiment me terrifia et me stimula en même temps. Il était tellement plus simple de me limiter à une relation intime tout en gardant une certaine distance. Simple question de précaution. On ne savait jamais où la vie allait nous conduire… Mais parallèlement, tout me semblait si différent en sa compagnie. Et en comparaison à mon espérance d’amour, ma crainte paraissait dérisoire. Mon désir avait des proportions inimaginables. J’étais loin à présent de pouvoir les contenir. J’avais déjà dû mal à rester à ma place et à garder mes mains chez moi, et je ne faisais guère confiance à mon self-contrôle. Essayant de faire abstraction à ma respiration qui s’était à nouveau emballée, je murmurai :



      ●● Qu’il soit trop court n’est pas un problème. Il suffit de faire grandir cette fleure pour qu’elle t’atteigne. Dans ce monde, tout est possible…


    Le noir, le néant. Voilà qui mérite de provoquer la terreur. La vraie, qui engendre paralysie et paranoïa pendant toute la durée du supplice. Pour ma part, il était la source de mes cauchemars. Il n’y a rien de plus affolant qu’une nuit sans étoile, une journée sans rayon de soleil, un sourire sans éclat. J’aurais pu me passer de la parole, l’ouïe ou le goût. Je ne pouvais toutefois pas me passer de la vue. Jusqu’à ce que mes paupières soient trop lourdes, mes yeux restaient grands ouverts dans la clarté offerte par la lune. Cette soirée était décidément une exception à toutes mes règles. Je fermai les paupières, accordant une confiance aveugle en Jonathan. Mes pulsions et désirs contrôlaient mes actes. La distance nous séparant n’était plus, et j’avais laissé mes mains aller là où elles le désiraient. Je tentai vainement de garder une certaine pudeur, histoire de. Résolution vaine, j’eus beaucoup de mal à contenir mes instincts. Il me sembla redécouvrir le véritable sens de nom commun masculin singulier : « baiser ». Et pourtant, Dieu seul savait à quel point j’entretenais une culture générale large dans ce domaine. Je compris seulement à présent la différence entre un baiser physique et un baiser sentimental. Et quelle différence ! Je fus étonnée de voir à quel point elle était marquante. Ma grand-mère m’avait tenu un discourt à ce propos, un jour… Il m’était cependant incapable de m’en souvenir en ce moment. Plus tard, peu être.

    Alors, plus rien ne comptait. Les larmes de ce vieillard au parc. Les craintes de sa grand-mère. La mort de la mienne. Sa fuite à Vancouvert. Tous les secrets de cette ville. Ses habitants apeurés ou mystérieux. Ce monde de fou. Notre moulage raté. Les verres brisés à mes pieds. Ma brûlure à la main. Mes émotions vagabondes. Les regards curieux virés sur nous. Un groupe d’alcoolique chantant à tût-tête « il est des nôtres, il a bu son verre comme les autres ». La nuit qui avançait à grand pas… Non, rien à part lui n’avait d’importance, maintenant. Et c’est avec un sentiment de désir inassouvi que ses lèvres quittèrent les miennes. Il me fallut quelques secondes pour laisser mes pensées me revenir. Je ne m’écartai cependant pas de lui de sorte à ce que nos deux corps restent côte à côte. Seulement quelques centimètres séparaient nos regards. Il me suffisait de murmurer pour me faire entendre.



      ●● Tu…


    Mon souffle se brisa entre mes lèvres et je baissai les yeux. J’avais tant à dire. Il y avait encore tant de questions qui restaient en suspens dans mon esprit. Et j’avais tellement peu envie de détruire ce moment avec des paroles inutiles. Un baiser ne voulait-il pas dire beaucoup plus que des mots ? Malgré tout, certaine chose restait trop floue à mes yeux. Ma curiosité ne dépassait pas mon désir, loin de là, mais il me fallait comprendre. Et cet endroit n’était peut-être pas le plus approprié.


      ●● Je n’aime pas cet endroit. Emmène-moi autre part…


    Pour souligner mes mots, je rapprochai d’avantage mon visage du sien. Nos lèvres s’effleurent. Un frisson me parcourut, et quelques secondes plus tard je le sentis frissonner à son tour. M’éloignant lentement, je souris. A vrai dire, je n’aimais pas tout Black Valley. Je ne me sentais à l’aise nulle part. Évidemment, mon point de vue allait surement changer en sa compagnie. Mais tout de même, ce bar ne m’inspirait pas confiance. J’avais appris à me méfier de tout. Tout, sauf de lui.
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You ran away and you took my heart Vide
MessageSujet: Re: You ran away and you took my heart   You ran away and you took my heart EmptyMer 20 Jan - 20:28

    Le silence total régnait en moi, ne trouvant aucune pensée pour venir le trancher. Le néant siégeait de force, sans m’en laisser le choix. Toute lueur désopilante venant lui faire affront était rapidement réduite à se taire. Une vague d’inquiétude, due à l’alternance de sentiments confus, qui était en train de me traverser ne fit qu’un tour, anéantie directement par le Silence lui-même. Il était impitoyable et ne commettait aucune erreur. A quoi cela rimait-il ? Le paradoxe de cette situation me provoquait un sentiment de honte, même si je n’en savais exactement les raisons. J’étais faible fasse au haut mur qui se soulevait dignement devant moi, bloquant le chemin. Était-ce pour autant une raison de se terrer et d’attendre que la voie se libère ? Le seul avantage que j’y voyais était la prudence, sinon pour le reste, cela me rendrait encore plus honteux. Les quelques songes qui parvenaient à résister à cette extermination radicale me suggérait de rompre ce silence, qui s’avérait devenir trop long. J’avais les clefs, je n’avais qu’à avancer.

    Chaque battement de mon cœur se faisait ressentir. Chaque respiration s’admettait une importance. Chaque pensée me tirait plus loin que les limites convenues. Mais où allais-je ? J’avais fait le serment de rester sage en toutes occasions, était-ce la folie qui s’en prenait à moi ? Mes pensées avaient vu leur court se transformer, dans un sens bon ou mauvais. Mais que se passait-il ? Je ne trouvais de mots à mes sensations ; je ne pouvais que laisser prétendre à une folie grotesque qui s’appropriait mon corps. La note était donnée, me restait juste à la suivre. La convoitise qui avait possédé mes idéaux pendant tant de temps avait enfin été libérée de toutes contraintes et avait laissé ses sbires s’emparer de mes sentiments. C’était donc à cause de ce fou désir que je m’étais avancé trop près. Sans m’en rendre compte, j’avais détruit moi-même mes limites. Était-ce convenable ?

    L’emprise avait été trop grande pour être combattue. J’avais pourtant tenté de résister, en vain. J’étais pourtant conscient que dès que mes lèvres effleureraient les siennes, tout espoir de raison s’en irait. Je l’avais su mais pourtant j’avais failli à ma tâche. Toutefois, un sentiment, enfoui dans les profondeurs même de mon âme, me disait que j’avais eu raison. C’était mon destin de la retrouver, de la redécouvrir et de l’aimer à nouveau. Si tel était le cas, alors pourquoi aurais-je dû refouler mes désirs ? Question bien pertinente, je devais l’avouer. Tout de même, mon avis était partagé. Je n’avais rien à lui offrir, ici elle était en danger permanent. Black Valley n’était pas un lieu pour elle. Dès la fin de cette soirée, il fallait qu’elle reprenne un avion pour Vancouver, qu’elle oublie toutes traces de cette ville et qu’elle s’oblige à attendre. Seulement, avais-je la force de la laisser partir sans émettre une faible contestation ?

    La léthargie dans laquelle baignait mon esprit finit soudainement. Une Illumination céleste vint m’éclaircir mes songes trop profonds. Je repris peu à peu le sens de la soirée et rouvrit mes yeux à l’extérieur. Elle était toujours là, assise. Je la contemplais sans mot. De nouveau, aucune parole ne me serait efficace à décrire ce que je ressentais à cet instant. De l’amour ? Pour une fois, je trouvai ce mot faible, pas à la hauteur de mes intentions. Ce n’était pas de l’amour que je ressentais, c’était bien autre chose. Un sentiment sans nom, bien différent et bien plus fort que ce qu’on appelait communément l’amour. Aucune comparaison …

    • C’est vrai, l’impossible s’avère être réalisable dans cette ville. Toµutefois, il m’est nécessaire d’une aide, car la fleur ne peut grandir seule …


    J’avais submergé pour lui répondre. Une fois fait, je pouvais me replonger dans mes songes incertains. Je me demandais vers quoi j’allais. Je n’aimais pas avoir tant de questions sans réponses ; mais je n’avais pas le choix. Au fait, pourquoi tant de tourments à ce sujet ? Je devais l’avouer, je me perdais moi-même dans des raisonnements sans raison, dans des explications qui au fait n’expliquait rien et dans des réponses qui ne répondaient pas à mes questions. Le silence reprit place. Je ne l’empêché pas, laissant faire ses propres desseins. Je laissai mon esprit s’évader vers d’autres lieux, où il ne sera pas subi à un interrogatoire inutile, là où il trouvera un calme apaisant, là où il pourra persister sans risque.


    Les songes intérieurs qui me tourmentaient depuis quelques minutes me démolissaient, pierre après pierre. Au fin fond de moi, là où mon esprit n’avait même plus d’emprise, là d’où se propageait l’essence même qui le définissait, subsistait une fleur ; la fleur de l’âme. Nom bien étrange pour une chose bien étrange. Cette partie le point de départ de toute sensation, de tout sentiment. C’était de là que partait chaque parcelle de vie, c’était le centre de tout. Habituellement, c’était une partie du corps intouchable, trop profondément enfouie. Cependant, je savais très bien que je n’étais pas quelqu’un d’habituel. J’avais une marque bien à moi. De plus, le dilemme qui me tiraillait, qui me forçait à choisir une résolution, m’exaspérait tellement que le seul refuge à ma disposition était cette fleur, cadeau divin dont je jouissais avec droit. Seulement, les temps changeaient. Le monde se défigurait dans un élan indécis qui n’avait pas d’aboutissement prédéfini. C’était à se demander si Celui-Qui-Siégeait-Haut-Dans-Les-Cieux le savait. J’avais tendance à affirmer que non, qu’Il en avait juste une vague idée. Mais, si tel était le cas, cela apportait une contradiction irréfutable face à la Foi. Cela faisait depuis bien longtemps que j’avais oublié la Religion. Même si ma grand-mère, avec laquelle j’avais vécu la majorité de ma vie était vouée au catholicisme, elle ne m’avait jamais vraiment initié à croire aux mêmes croyances qu’elle. J’avais tissé ma vie à ma façon, comme l’envie me prenait, éloigné de cette théorie de Dieu Unique et de Créateur de l’Humanité. Parfois, il me venait même à penser que les peuples de l’Ancien Temps avaient peut-être eus des bases plus solides que les nôtres. Ne serait-ce pas, d’une façon ou d’une autre, un peu plus logique qu’il existe plusieurs divinités ? Pourquoi les croyances des grecs, les romains ou encore les incas et les aztèques auraient-elles moins de crédibilité que celles des temps modernes ? Ou alors, les hindous et les bouddhistes, peut-être sont-ils plus proches de la Vérité que nous ne le pensons ? Quoi qu’il en soit, je me demandais pourquoi les chrétiens, musulmans et autres peuples monothéistes s’élevaient à un niveau plus élevé que les autres civilisations. Quand on y pense, vu l’immensité du monde, ne serait-ce pas plus logique qu’il y ait plusieurs créateurs pour peaufiner chaque détail, pour ajuster chaque dérèglement, pour fonder un tel univers ? Lors d’une étude à Vancouver à propos des religions du monde, j’avais approfondi plusieurs sujets particuliers, dont l’animisme. Cette théorie, rejetée et délaissée par les Grands du moment, n’était pas pour autant sans valeur et sans importance. Il venait même à penser qu’il y avait autant de crédibilité dans cette théologie, si pas plus, que dans celles d’un Dieu Unique. En y réfléchissant, la planète est un immense organisme où cohabite une multitude d’espèces. Chaque cellule de cet organisme a un rôle à jouer – aussi infime soit-il. Chaque être à une tâche spécifique qui à une importance sur l’impact de la vie. Le destin de chaque vivant est entremêlé avec eux des autres vivants, pour ne former qu’un seul et unique être, la Terre.

    Sa voix cristalline me sortit de mes songeries, bien décalées avec l’instant présent. Je me rendis compte que durant ces dernières minutes je m’étais fortement éloigné de mon but principal. Je m’étais laissé guider d’une pensée à l’autre et j’en étais arrivé à une question fondamentale qui me tourmentait ; le commencement de tout. Peut-être était-ce à cause de mes études scientifiques que j’avais un avis plutôt subjectif et que je ne croyais que trop difficilement à ces histoires de religions.

    Ces paroles n’étaient pas dépourvues de sens ; cet endroit était inapproprié. Une odeur qui me dérangeait frottait mes narines ; il fallait dire que les amateurs de ce bar gardaient l’odeur de bière en permanence sur eux. Et toutes ces odeurs mélangées donnaient un parfum qui n’était pas à mon goût. Je me tournai légèrement afin d’être parfaitement en face d’elle. Ma main gauche m’échappa et se rapprocha de Janae. Elle avait la peau froide et je me rendis compte à ce moment qu’au fait, j’avais froid également. La nuit continuait son court, n’attendant pas que nous nous remettions de notre re-rencontre. Mon autre main voulut elle aussi s’en aller mais je la retins de force. Les quelques dernières minutes avaient éveillé en moi un désir démesuré qui ne demandait qu’à être comblé. Chaque partie de son corps m’attirait un peu plus. Les frustrations précédentes qui avaient embrumé mon esprit s’étaient dissipées, laissant place à un sentiment d’amour constant. Alors qu’elle finissait ces paroles, elle s’avança vers moi. Son visage devenait tellement proche que faire demi-tour était impensable. Toutefois, même si j’avais eu cette folle envie, je n’aurais pas eu le choix, vu que ce fut elle qui s’avança davantage. Chacun de ses instants me semblaient irréels, impossibles, irréalisables. Pourtant, elle était bien là, devant moi. C’était bien elle que mes lèvres effleuraient impudiquement. Elle était véritablement revenue. Pour moi. Cette pensée me ravit. Je la sentis émettre un mince frisson qui ne put m’empêcher d’en avoir un à mon tour. Elle se retira doucement de moi et fit un sourire auquel je répondis joyeusement.

    • Oui, je crois qu’il vaut mieux s’en aller d’ici. Il s’est passé entre ces murs des événements qu’il vaudrait mieux oublié et je n’ai aucunement envie de fêter nos retrouvailles dans un tel endroit, maudit par le diable lui-même. Le paradoxe est tel qu’un sentiment d’incohérence entre mon âme et mon esprit m’envahissait en ces lieux. Allons-nous en, c’est préférable.


    Je sentais que j’en avais dit de trop. Depuis le début, j’essayais d’être le plus clair possible dans mes paroles, ce qui était un vrai challenge pour moi. Ceux qui me connaissent bien pourraient vous le confirmer. Je me levai doucement, attrapai sa main et attendit qu’elle se lève elle aussi. Je m’approchai d’elle et lui décrocha un nouveau baiser. Puis, je me retournai et traversai le bar, tout en faisant abstraction de tous les regards qui nous défiguraient. Je poussai la lourde porte et sortit. Je me retournai afin d’être sûr qu’elle me suivait, ce qui s’avérait être le cas.

    • Tu sais, Janae, je ne me souviens pas avoir passé une telle soirée, bien que je l’affirme ma mémoire me trahit souvent ces temps-ci.


    Je marquai une pause et respirai un bon coup. Je ne trouvais pas les mots suivants, je ne savais comment les aligner, j’hésitais par lequel commencer. Après quelques secondes d’hésitation, je me rapprochai d’elle afin qu’elle seule entende, bien que nous n’étions que nous deux sur le seuil. Je mis mes lèvres près de son oreille et après un petit rictus qui m’exaspérait, je murmurai.

    • Je t’aime …


    D’un coup, les hauts murs qui m’entouraient s’effondrèrent. La cage qui m’enfermait fut réduite au néant. Je sentis de nouveau un sentiment de liberté. Cela me faisait étrange, comme si être libre avait un arrière goût inhabituel. Peut-être que j’étais cloitrer entre ces murs depuis plus de temps que je ne le pensais … Quoi qu’il en soit, ces mots m’avaient libéré. J’étais de nouveau libre.

    La nuit était particulièrement sombre. A cause de cela, la lune tranchait les ténèbres et sa splendeur arrivait sur terre. Je ne pouvais rester indifférent à ces lueurs, à mon grand malheur. Vers quelle catastrophe m’amenait cette soirée ? Le vent soufflait modérément, guidant les quelques arbres de la rue à son rythme dansant. Quelques amas de neige se trouvaient çà et là, emplissant la rue d’un air délaissé. Je pris la main de Janae et me dirigeai vers un banc un peu plus loin. Je m’assis et elle fit de même. Des pulsions, autant provoquées par la présence de la jeune femme que par l’éclat de la lune, me rendait nerveux. Toutefois, je ne fis de remarque et me retournai vers Janae, me replongeant dans son regard prenant que j’adorais tant.


    « Maudit soit le jour où j’avais quitté Vancouver pour cette ville, digne des Enfers. Infâme soit la pensée qui m’était apparue de ne rien lui avouer à propos de mon départ. Ignoble soit le secret qui m’avait forcé à ne rien avouer. »

    J’avais commis des fautes, toutefois j’étais sûr que je ne les commettrai plus. Plus, jamais je ne la quitterai ! Quel qu’en soit le prix à payer…



    « Savez-vous que l’amour est quelque chose de fabuleux ? »
    « Si vous l’affirmez … »
    « Vous n’avez pas l’air convaincu ? »
    « Si, juste un grain de méfiance. »
    « Ah bon … »
    « Oui. Ces temps-ci sont incertains. La finalité de ces événements est inconnue. Le temps est changeant, vous savez. Les limites précédemment instaurés ne sont plus respectées. Même de l’amour il faut se méfier. Des ombres avancent. En arrivant ici, on m’avait prévenu, mais je n’avais pas tenu compte de ces avertissements. Vous savez, Black Valley n’est pas une ville fantôme sans raison. »


    Un sifflement me chatouilla. C’était le vent. Que me disait-il ? Je ne comprenais pas tout. Seulement, je n’attendis pas d’en comprendre plus, je me retournai, souris à Janae et m’approchai à nouveau. Son souffle s’entremêlait au mien. Ses yeux se fermèrent tout en même temps que les miens. J’abandonnai toute raison et laissa mes désirs les plus fous surgir …

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