Si il y avait bien une chose que Chris Henlow savait faire, c'était, justement, de ne rien faire. Qu'est-ce qu'il aimait cette vie libre de tout travail, de tout devoir ! Car oui, il était libre ! Une liberté paradoxale, bien entendu, car, si il ne travaillait pas et n'avait aucune dette à rendre à personne, en contrepartie, il ne pouvait pas sortir de cette ville de malades. Il ne pouvait pas échapper ni aux vampires, ni aux sorciers, ni aux autres monstres qui rôdaient dans le coin. Oui, car il était sur que des mutants n'allaient pas tarder à sortir de la forêt pour l'attaquer. De la paranoïa ? Haha... En même temps, depuis l'temps qu'il était là, il était prêt à croire à tout !

Ce soir-là, Chris avait décidé d'accomplir une petite marche nocturne. Il y avait un endroit où il n'était jamais retourné depuis son arrivée, et il s'agissait des portes de la ville. Il avait déjà essayé de partir par la grand route, mais s'était frotté u barrage électrique, ce qui expliquait pas mal de choses... Enfin bref, toujours est-il qu'il n'avait jamais tenté de repasser par là où il était arrivé. Et ça le titillait.

Chris était alors sorti de sa chambre d'hôtel, avait, comme à son habitude, fait un clin d'œil à la réceptionniste, avant de sortir. Autant vous l'avouer desuite, Chris s'était tapé la réceptionniste à chaque fois que celle-ci lui avait réclamé l'argent pour payer sa chambre, c'est à dire trois fois. Il n'en était pas fier, mais si ça pouvait rendre service à cette jeune fille solitaire et, par la même occasion, l'exempter de payer ses dettes, ça lui convenait. Elle pensait qu'il était fou d'elle, si seulement elle savait.

Un sourire se dessina sur le beau visage du jeune homme. Car il était beau. Plutôt grand, musclé comme il le fallait, son corps était un objet de désir. En outre, son visage plaisait autant. Ses yeux bleus, sa barbe de trois jour qui lui donnaient l'air d'un bad boy, et ses cheveux jamais coiffés, tout cela faisait craquer les filles et les mecs, et il en était conscient. Les mains dans les poches de son blouson en cuir, il avançait, confiant. Et puis, il lui sembla entendre un bruit. Un espèce de sanglot. Il se retourna et fronça les sourcils pour mieux voir dans la pénombre de la nuit.

C'est alors qu'il la vit, assise, près des portes de la ville. La jolie Maddison Anderson. Ils s'étaient rencontrés par hasard, alors que Chris, dans sa nonchalance habituel avait bousculé la belle. En tant que gentleman averti, il s'empressa de lui offrir un café pour s'excuser de sa maladresse. C'est ainsi qu'ils devinrent amis. Bons amis même. Il lui arrivait même de penser que Maddison n'était pas insensible à son charme. En même temps, qui pouvait lui résister ?

Cependant, il ne put s'empêcher de remarquer qu'elle avait pleuré. Ses yeux rougis, ses joues qui semblaient humides comme si des larmes avaient ruisselé sur la surface de sa douce peau. Chris s'assit en face d'elle en lui souriant. Il espérait lui remonter le moral. Au fond, il aimait bien Maddison, elle le faisait rire et il appréciait son intelligence et son bon sens.

Maddison – Qu’est-ce que tu fais ici à une heure pareil monsieur Chris Henlow ?

Il sourit encore plus. Quelle connerie allait-il bien pouvoir sortir ? Il se leva et s'asseya à côté d'elle, passant un bras derrière son cou et la serrant contre elle, comme signe d'amitié profonde et de soutien. Il se mit à regarder le ciel. Faire patienter les autres, c'était son truc. Et puis, il aimait paraitre mystérieux, ténébreux, enfin, ce genre de trucs...

Chris – Eh bien, je suis venu te voir, ma chère Maddy. Figure-toi que je t'ai cherchée dans toute la ville. J'avais besoin de te parler de quelque chose, mais je vois que tu en as plus besoin que moi. Qu'est-ce qu'il t'arrive, ma jolie ?

Maddison – Je…ne suis pas très bien en ce moment mais ça n’a aucune importance, je ne veux pas t’embêter avec ça…

Chris fronça les sourcils. Aucune importance ? A d'autres. On ne pleure pas pour rien. Il la regarda plus précisément. Elle avait l'air inquiet; comme si elle avait peur de paraitre vulnérable devant lui. Ca avait un petit côté vexant. Après tout, ils étaient amis, ils pouvaient tout se dire, sans avoir peur d'être jugés. C'était ça le principe de l'amitié pour Chris. Pourvoir tout dire à l'autre, sans que celui-ci ne juge. Autrement, ça n'était pas un ami. Il lui adressa un sourire compatissant.

Chris – Maddy, Maddy, Maddy... *soupir* Je pene que toi et moi, on en n'est plus au stade des cachotteries, si ? Tu sais très bien que tu peux tout m'dire, j'suis ton ami, après tout ? Et puis, j'aime pas te voir dans cet état...

Il lui fit un clin d'oeil. Un espèce de réflexe qu'il avait. Ca faisait rire, il se donnait des airs de charmeur, mais ceux qui le connaissaient vraiment savaient qu'il était loin d'être aussi superficiel. Qui était le vrai Chris ? Le tombeur, ou l'autre ? Personne ne le saur jamais. Il se plaisait dans les deux rôles, et il savait quand il devait faire apparaitre l'un et l'autre. Oui, Chris était un mélange des genres, une contradiction. Et il aimait ça. Décidément motivé à relever le défi de faire sourire Maddison, il la prit par la main et l'entraina à la suivre. Les portes de la villes étaient situées sur une route, la route principale. La main dans la main, amicalement, bien entendu, les deux jeunes gens marchaient en silence.

Chris - Alors, tu vas te décider à lâcher le morceau, ou vais-je devoir employer les grands moyens ?

Il avait dit ça en riant, toujours dans l'espoir de la faire rire, elle aussi. Il détestait voir ses proches souffrir. Ca lui était insoutenable. Il aimait que tout l'monde soit heureux, même si dans cette ville , c'était mission impossible. Alors il s'était entouré des bonnes personnes et avait toujours veillé à les protéger de tout. De la tristesse, des vampires, des sorciers, des peines d'amour. Lorsqu'il faisait ça, il se sentait maitre d'un rôle, un rôle qui lui conférait enfin une identité. Aider les autres, c'était son truc. Remonter le moral, il savait faire. Ca faisait au moins un truc qu'il savait faire, et c'était déjà ça de gagné...

Il s'arrêta quelques minutes et regarda le ciel. Lui aussi avait vécu de mauvaises choses. Des choses qui l'avaient blessé, heurté... Et il avait eu la chance d'avoir un ami à ses côtés pour l'aider à ne pas faire n'importe quoi. Toute sa vie, il avait eu des regrets. Mais ne pas penser au passé, ça, ça permettait d'avancer. Il ne devait plus penser au gang, à ceux qu'il avait blessé, physiquement et moralement, il ne devait plus penser à celles qu'il avait largué, ou utilisé. Il ne devait plus penser à la mort de sa mère. Cet évènement qui avait tout changé. Sa version de voir le monde. Sa vie. Son caractère. Non, tout celà c'était fini, et aujourd'hui, il était à Black Valley, enfermé pour toujours dans cette ville où personne ne savait qui il était. Et c'était tant mieux.

Maddison – J’aimerais tellement sortir d’ici Chris…j’aimerais tellement être quelqu’un d’autre…je déteste ce que je suis…je n’ai..personne…ne te méprend pas, je t’aime beaucoup, tu es un ami très chers mais j’ai besoin de quelqu’un qui m’aime…pas comme un ami tu comprends ? Je voudrais pouvoir dire que quelqu’un pense toujours à moi, j’aimerais sentir cette sensation de frisson lorsqu’un homme s’approche de moi, j’aimerais juste…avoir quelqu’un…je me sens seule.

Chris ne savait pas quoi faire. Il comprenait réellement Maddy. Sa solitude. Il ressentait ça, quelque fois aussi. Qu'il pourrait mourir, personne ne s'en soucierait. Il pourrait disparaitre à tout moment, personne ne le remarquerait. Il la comprenait, oui. Mais comment l'aider ? Il n'avait pas beaucoup d'amis, ici. Il n'aurait pas pû lui arranger un rendez-vous... Comment faire ? Il détestait quand elle pleurait. Il détestait la voir dans cet état, surtout qu'il ne pouvait rien y faire. Il la prit dans ses bras et la serra contre lui.

La plupart des gens pensent que Chris est un salaud sans cœur.Mais il se méprennent. Chris a des sentiments, beaucoup plus qu'il ne ledit, certes, mais il en a. Et lorsque c'est de ses amis qu'il s'agit, il est prêt à faire tout et n'importe quoi pour les sauver, pour les réconforter. Il serait prêt à mourir pour les gens qu'il aime, ça c'est clair et net ! Mais il ne mourait pas ce soir, non. Il était bien décidé à vivre et à faire sortir Maddy de ses pensées négatives... Comment ? Il ne le savait pas encore. Mais il trouverait bien.

Il se détacha d'elle quelques instant et sécha ses larmes. Il lui souriait, en espérant que ça la ferait sourire. Maddy voulait de l'amour. Elle voulait un petit ami. Il l'avait bien compris. Mais à Black Valley, c'était dur de ne pas tomber sur un affreux vampire ou autre créature étrange. Il soupira. Lui même en avait pas mal bavé par ici avec les histoires amoureuses. D'abord il y avait eu Lubby. n'avait pas vraiment duré puisqu'il avait rencontré Emily. Et puis, en ce moment, il la voyait de moins en moins. Il sentait qu'elle lui échappait. Mais que faire ? Il regarda Maddison dans les yeux, dans ses yeux encore rougis par les larmes.

Chris - Maddison... Je sais ce que tu ressens. Non j'te promets. Je sais exactement ce que tu ressens. Comme si quelque chose te manquait, quelque chose que tu n'arrivais pas à trouver. Je sais. Et je sais aussi que ça fait mal. Très mal. Mais je veux pas que tu te mette dans cet état pour ça ! Tu m'entends ? Maddison, tout arrivera en temps et en heure, mais en attendant, arrête d'y penser. Tu sais quoi ? Dès que tu songes à ça, tu m'appelles et je viendrais de suite ok ? Je... Je déteste te voir comme ça. Sérieusement. Ca me révolte. Ca m'donne envie de faire passer un casting à tous les mâles de Black Valley pour te trouver le mec parfait..... Enfin, moins parfait que moi, autrement ça n'existe pas *rire*.

Il regarda Maddison quelques instants avant de reprendre.

Chris - J'me sens piégé aussi ici, tu sais. Je sais pertinemment que je vais mourir dans cet enfer. Mais ça m'est égal. Et tu sais pourquoi ? Parce que toute ma vie, j'ai cherché une ville comme celle ci ! Une ville où quoi que je fasse, les gens qui m'aiment m'aideront quoi qu'il advienne !Parce qu'ici, Maddy, on est tous dans le même pétrin. On risque tous de mourir à chaque instant. Alors on profite. On s'amuse. On s'aime. Et c'est ça que j'aime à Black Valley...

Chris souriait à Maddy. Il avait lui même apprécié son petit discours et le trouvait très bien ! Il sentit quelque chose de froid se poser sur sa joue. Il regarda en l'air et sourit de plus belle. Il tendit ses mains de chaque côté de son corps. Il neigeait. Il neigeait à Black Valley.